La consommation d'espaces et ses déterminants

d’après les Fichiers fonciers (période 2009-2019 – chiffres au 1er  janvier 2019)

SYNTHESERAPPORT ET INFOGRAPHIE

A noter : les données 2009-2020 sont disponibles. Le rapport d'analyse sera mis à jour dans les prochains mois. Dans l'attente, un premier article de présentation est disponible en cliquant ici.

En France comme en Europe, des objectifs convergents de réduction de l’artificialisation ont été décidés par les pouvoirs politiques. Ainsi, l’Union Européenne a pour objectif de « supprimer d’ici à 2050 toute augmentation nette de la surface de terres occupée ». En parallèle, la France a publié le 4 juillet 2018 le Plan National Biodiversité, qui vise à atteindre le « Zéro artificialisation nette » (ZAN).

Le projet de loi « Climat et résilience », actuellement en cours de débat, prévoit d’inscrire dans la loi un objectif de division par deux du rythme de consommation d’espaces sur les dix prochaines années, en plus de l’objectif d’atteinte du ZAN à l’horizon 2050. Pour la 1ère décennie, il est envisagé de prendre comme référence la consommation d’espaces NAF à compter de l’adoption du texte de loi.

L’objectif de ce rapport est à la fois :

  • d’analyser les grandes tendances de la consommation d’espaces, ainsi que les éléments de contexte permettant de mieux comprendre le phénomène pour mieux le limiter. Ces éléments sont réunis dans la synthèse.
  • de présenter des méthodes et indicateurs permettant aux acteurs d’analyser leur territoire à une maille locale. Ces indicateurs sont présentés dans le rapport détaillé.

Ce rapport couvre la période 2009-2019, c’est-à-dire entre le 1er  janvier 2009 et le 1er  janvier 2019. Il s’agit d’une mise à jour de deux rapports antérieurs portant sur les données 2009-2017 et 2009-2018. Les évolutions entre les différentes versions sont indiquées dans le rapport détaillé.

La consommation d'espaces au niveau national

Carte de la consommation d'espace 2009 2019

La dynamique de consommation d’espaces connaît, depuis la période 2009-2011, une baisse continue au niveau national, passant de 33 012 ha en 2011 à 22 384 ha en 2015, soit une diminution de 32 %. Cependant, en 2016, on observe une augmentation par rapport à 2015. La période 2016-2019 est caractérisée par une  stagnation du rythme.

Il faut rappeler ici que ces chiffres prennent en compte la consommation d’espaces sur le territoire cadastré, et minimisent donc le phénomène dû aux infrastructures.

Image ci-contre : Consommation annuelle d’espaces NAF au niveau national

Une efficacité en hausse sur la période 2009-2019...

Afin de répondre aux besoins futurs des populations (en raison de la décohabitation des ménages, de l’accroissement de la population mais aussi de la vétusté des logements), il est difficile de compter sur une baisse de la construction. Il est donc nécessaire, pour arriver à diminuer la consommation d’espaces, d’augmenter de manière significative (et bien plus qu’au cours de la période précédente) l’efficacité de l’urbanisation, qui s’entend comme la surface consommée moyenne pour accueillir un nouveau ménage. Pour augmenter l’efficacité, il est possible de jouer notamment sur deux leviers, à savoir l’augmentation du renouvellement urbain (renouvellement de la ville ou du bourg sur elle/lui-même) et l’augmentation de la densité des opérations.

Sur la période 2009-2018, on observe une augmentation de l’efficacité de la consommation d'espaces. En d’autres termes, on construit plus, mais on construit de manière plus efficace. Cette augmentation de l’efficacité est une tendance à surveiller ces prochaines années.

Graphe de la consommation d'espace et de la construction

...mais qui demeure insuffisante

Il faut cependant tempérer cette nouvelle, et ce pour trois raisons :

  • L’année 2018 montre une diminution de ce même indicateur. Même si la tendance est à l’augmentation, il est difficile, à ce stade, de savoir si l’année 2018 est un « accident », ou si elle inaugure une tendance à la diminution ou à la stagnation de l’efficacité.
  • L’augmentation d’efficacité est avant tout portée par l’activité (+ 40%), et moins par l’habitat (+ 20%).
  • L’efficacité n’augmente pas de la même manière sur tous les territoires. Il serait nécessaire d’étudier, territoire par territoire, comment a évolué cette efficacité, et par quelles opérations elle est portée : ce n’est pas la même chose d’avoir une augmentation uniforme de la densité sur toutes les opérations, ou seulement quelques opérations très denses en renouvellement urbain qui permettent d’augmenter la moyenne.
  • L’augmentation observée reste insuffisante pour atteindre l’objectif ZAN en 2050. En effet, même si l'efficacité de toutes les constructions (tous usages confondus) avait augmenté au même rythme que celle des constructions à destination d'activités économiques, cet objectif ne serait atteint qu'aux alentours de 2070 2 . Il faut en outre rappeler que l’efficacité de l’habitat a seulement augmenté d’environ 20 % sur la période.

Il faut toutefois noter que nos résultats portent sur la période avant la crise sanitaire. Or celle-ci aura sans doute des conséquences à la fois sur le rythme de consommation d’espaces, sa géographie et sur l’efficacité des constructions que ce soit en matière d’habitat (évolution de la densité, évolution de la périurbanisation) ou d’activité.

Graphe ci-contre : Comparaison entre le nombre de m² construits et les nouvelles surfaces artificialisées entre 2009 et 2018. Source : Sit@del locaux commencés, Fichiers fonciers 2009-2017

    

L’habitat, principal contributeur de la consommation d’espaces

À un niveau national, la répartition entre consommation d’espaces à destination de l’habitat, de l’activité ou du mixte est stable sur la période 2009-2019. On urbanise ainsi principalement à destination de l’habitat (68%), suivi par l’activité (26%). La consommation d’espaces pour des parcelles mixtes est quant à elle anecdotique (1,5%). La diminution de la consommation d'espaces observée dans la période récente a été portée, à un niveau national, à parts égales entre habitat et activité.

La consommation d'espace au niveau local

artificialisation communale 2009 2019

A l’échelle locale, on constate que la consommation d'espaces est un phénomène très polarisé, et guidé par deux forces majeures, à savoir la métropolisation d’une part et l’attraction du littoral de l’autre 1 . On constate ainsi une forte dynamique de consommation d’espaces autour du littoral, notamment autour de l’Atlantique et de l’arc méditerranéen, et autour des agglomérations. À l’inverse, la dynamique est plus modérée dans les régions qui connaissent un développement résidentiel moins soutenu comme l’ancienne région Picarde ou la Champagne-Ardennes.

Image ci-contre : Artificialisation par commune entre le 1er janvier 2009 et le 1er janvier 2019

 

Répartition au sein des aires urbaines

Au sein des aires urbaines, l’espace central reste très consommateur d’espaces, que ce soit dans la ville centre ou dans sa première couronne. Cela est notamment dû au fait que ce sont ces espaces qui concentrent le plus de ménages et d’emplois. Les espaces périphériques (ou périurbains) ont une dynamique plus forte, mais accueillent moins de ménages et d’emplois. Ainsi, si l’on regarde par rapport à l’existant, la dynamique (en % d’augmentation) se fait principalement en première ou deuxième couronne d’une agglomération.

L’efficacité de l’urbanisation diminue lorsque l’on s’éloigne du centre

On observe également une baisse de l’efficacité de la consommation d'espaces au fur et à mesure de l’éloignement au centre. En parallèle, le centre accueille beaucoup d’emplois et de ménages et s’artificialise beaucoup. À l’inverse, les espaces périphériques artificialisent un peu moins, mais pour accueillir beaucoup moins de ménages.

On peut citer comme exemple le territoire nantais : la ville centre a consommé 9,4 ha à usage d’habitat sur la période 2012-2017 pour accueillir 11 113 ménages. Dans sa périphérie, la commune de Le Pellerin a accueilli 210 ménages pour 5,1 ha consommés à destination de l’habitat. Ainsi, si Nantes consomme plus d’espace dans l’absolu, on peut considérer que l’urbanisation y est plus efficace, car la surface consommée moyenne pour accueillir un nouveau ménage est faible.

Se pose en outre la question, non étudiée ici, de la localisation des nouvelles constructions et de leur accès (notamment par les transports collectifs et les modes doux) aux services et emplois dans les territoires. Ainsi, à consommation d’espaces équivalente, la localisation de nouveaux ménages dans des espaces dépendants de l’automobile aura un impact écologique plus important.

Une part de l’habitat qui augmente à mesure que l’on s’éloigne des centralités

On peut en outre analyser le taux de spécialisation, c’est-à-dire la part d’habitat dans la consommation d'espaces. Au niveau local, les agglomérations montrent un gradient de ce taux de spécialisation : plus l’on s’éloigne du centre, plus la consommation d'espaces est majoritairement à destination de l’habitat.

De plus, à un niveau national, la répartition entre consommation d’espaces à destination de l’habitat et de l’activité pose question. Par rapport à la moyenne nationale, le Nord et l’Est ont tendance à construire plus pour de l’activité, et le Sud plus pour de l’habitat. Cette particularité n’a pas été creusée dans le cadre de cette étude.

L’artificialisation est issue de gros projets autant que de nombreux petits projets

Enfin, la consommation d'espaces est très polarisée au niveau communal : les 5 % de communes les plus concernées représentent 39,3 % du total des surfaces nouvellement consommées. Il faut toutefois noter que ces communes sont souvent le siège d’activités dont bénéficient aussi les habitants qui n’y habitent pas. A l’inverse, beaucoup de communes ont une consommation d’espaces qui peut paraître faible (quelques hectares sur la période) mais, ces communes étant nombreuses, l’impact cumulé est au final significatif.

Ainsi, la consommation d'espaces est à la fois la résultante de grands projets très consommateurs et de l’accumulation de multiples petits projets peu consommateurs individuellement.

Image ci-contre : contribution des différents quantiles à l’artificialisation nationale. Les quantiles sont calculés en nombre de communes.

Exemple de lecture : le centile le plus consommateur (1 % des communes avec le plus d’artificialisation) est responsable de 16,0 % du total de l’artificialisation sur la période 2009-2019

Contribution des différents quantiles à l’artificialisation nationale.

Leviers et interventions possibles pour atteindre le zéro artificialisation nette

 

Ainsi, l’artificialisation est la conjonction :

  • de territoires qui artificialisent beaucoup, mais qui font face à une demande importante (ménages, emplois...). Le recyclage urbain pourrait être encouragé pour diminuer l'artificialisation. Il s’agit, pour ces territoires, de travailler à un niveau opérationnel, mais aussi d’intégrer dans leur document de planification les gisements fonciers existants et d’y adosser un règlement permettant une mutation multifonctionnelle du site et / ou une densité adaptée au contexte local.
  • de territoires qui artificialisent moins dans l’absolu, mais pour lesquels l’étalement urbain est important, car de grandes surfaces sont artificialisées pour accueillir un faible nombre de ménages et d’emplois. Sur ces territoires, la question de l’efficacité de l’urbanisation, et la bonne définition des besoins, sont fondamentales. Il apparaît pertinent de travailler à un niveau plus global, notamment via les politiques de planification.

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Le pack de cartes et de graphes ayant servi à illustrer ce rapport est mis à disposition. La réutilisation de ces éléments est possible sous réserve de citer la source.

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